Le Test de Radical Dreamers

 

Chrono Trigger (Super Famicom)
Radical Dreamers (BS Super Famicom) Chrono Cross (Playstation)

Radical Dreamers est un jeu étonnant à plus d'un titre, et nous prouve à quel point la Super Famicom a su allier la variété à la quantité en matière de RPG. En effet, il faut tout d'abord savoir que Radical Dreamers est un jeu qui est sorti sur l'extension satellite de la console, le système BS. Cela signifie d'une part qu'il n'est pas sorti du Japon, comme beaucoup d'autres RPG de la console, mais aussi qu'il n'a finalement eu qu'une distribution assez restreinte même sur l'archipel. Et pourtant, il s'agit d'un titre qui ne manque pas d'attraits, à commencer par son appartenance à la série des Chrono. Oui, Radical Dreamers est la suite de Chrono Trigger, et lorsque l'on a dit cela, ca y est, la flamme s'allume, l'envie irrésistible d'essayer le jeu nous chatouille, et nous pousse à télécharger la rom, seul moyen désormais pour jouer au jeu.

Mais avant cela, il faut que je vous explique un peu de quoi il s'agit, car les surprises ne font que commencer, et il se pourrait bien que vous soyez étonné lors de votre partie. Radical Dreamers est en effet un RPG-Textuel. Késako ? Jamais entendu parler de cette bête là ? Rien de plus normal. Le RPG-Textuel est effectivement un genre très particulier, quasi-inexistant sur console, et c'est le premier attrait de ce jeu. Le principe est très différent de ce qu'on a l'habitude de voir. Ici, c'est la narration qui prime. Vous allez donc vous farcir des tonnes de texte, un vrai roman en réalité, et les possibilités interactives sont assez limitées. Il s'agit de choisir une action à effectuer parmi plusieurs, de décisions à prendre. Mais plus que tout, c'est l'histoire que va vous conter le jeu qui prime. Et on peut dire un grand merci à Terminus Traduction pour son travail de conversion du jeu en francais, car inutile de vous dire que la maitrise du japonais se révelait indispensable auparavant pour essayer de comprendre quoi que ce soit.

Le RPG-Textuel se rapproche donc fortement des romans de la collection "Le livre dont vous êtes le héros". Vous guidez les pas d'un jeune homme Serge, qui part explorer un manoir à la recherche d'un artefact magique. Ce sont ses actions, telles que prendre le chemin de gauche plutôt que celui de droite, entrer dans une piece, parler à un personnage, etc... que vous controlerez. Fort heureusement, l'histoire est bien écrite et accrochante, ne permettant aucune distance entre le joueur et le personnage qu'il incarne. Il n'en reste pas moins que les possibilités d'action sont limitées, à l'image des combats (d'ailleurs rares) où vos seules alternatives ne sont le plus souvent qu'attaquer ou fuir. En bref, l'interactivité est véritablement réduite au minimum, et ce afin de vous immerger complètement dans l'histoire.

Les 3 Radical Dreamers : Kid, Serge et Magil
Il faut traverser la forêt Kistune avant de rejoindre le manoir Viper

L'histoire justement. Vous incarnez donc un jeune homme, musicien de profession, et répondant au nom de Serge. Il fait équipe avec une jeune femme qui n'a pas sa langue dans sa poche, Kid, et un être ténébreux, sombre, et doté de pouvoirs magiques, et qui se fait appeler Magil. Le rapport avec Chrono Trigger ? Ils sont nombreux en réalité. Tout d'abord, il s'agit d'une suite directe. Sans trop vous dévoiler le scénario, je peux quand même vous dire que Kid est la fille adoptive de Lucca, et que Magil (vous l'auriez vite reconnu de toute facon) est en réalité Magus ! De nombreux autres liens existent entre les 2 jeux, mais je vous laisse la surprise de leur découverte. Les 3 héros de Radical Dreamers ont pour but de récupérer la Flamme de Glace (Frozen Flame). Il s'agit en réalité principalement de l'objectif de Kid, qui en a fait la promesse à Lucca ... avant que celle-ci ne décède. La promesse était plus exactement d'enterrer la Flamme de Glace dans la tombe de Crono. Mais j'en ai déjà presque trop dit ! En revanche, parmi les évènements se déroulant entre les 2 épisodes, il y a donc eu la mort de Lucca (personnage central de la série à plus d'un titre). A la suite des évènements de Chrono Trigger, Lucca a donc receuillie Kid, qui n'était encore qu'un bébé (cf l'une des fins cachées du jeu avec un ajout dans la version playstation). Par la suite, Lucca a monté un orphelinat. Mais un jour, elle périt dans l'incendie de celui-ci. C'est Lynx, un odieux personnage qui est à l'origine de ce massacre, et depuis ce jour, Kid lui voue une haine farouche. Et justement, c'est Lynx qui possède la Flamme de Glace. Kid accompagnée de Magil et de Serge part donc à l'assaut de son manoir afin de mettre la main sur cet objet magique.

Le Manoir Viper !
Radical Dreamers utilise beaucoup les jeux d'ombre et de lumière

La manoir Viper sera donc votre terrain de jeu. S'il est principalement habité par des trolls et autres ennemis, c'est aussi la résidence de Riddel, une jeune fille dont Magil est amoureux, et au destin très particulier. Riddel est la fille adoptive de Lynx .... qui est en réalité le meurtrier de son père, le général Viper ! D'autres rencontres tout aussi inattendues vous attendent dans le manoir.
La progression est comme je vous l'ai déjà dit basée sur des interactions simples (choisir un chemin, entrer ou non dans une pièce, etc...) et parfois rythmée par de petites énigmes (trouver la clef d'une porte, actionner un mécanisme...). Mais peu importe l'itinéraire emprunté, vous bénéficierez de toute facon du scénario. Radical Dreamers, c'est avant tout de la lecture ! Les plus courageux et les plus attentifs pourront approfondir un peu l'exploration, et dénicher ainsi de nombreuses anecdotes, tant en relation avec Chrono Trigger qu'avec Chrono Cross ! En effet, comment ne pas vous parler du 3ème volet, paru sur Playstation ? Chrono Cross est en réalité un remake de Radical Dreamers. De nombreux ajouts ont été faits, mais le scénario est posé par Radical Dreamers, et certaines explications de Cross sont apportées par Dreamers. La saga finalement constituée aujourd'hui de 3 épisodes possède ainsi un scénario cohérent, mais parfois tellement complexe, que cela en donne le tournis.

Riddel, la fille adoptive de Lynx
Et un peu de magie !

Et pour en ajouter un peu plus, Radical Dreamers en ajoute encore une couche ! Une fois terminée l'aventure, vous découvrirez que vous n'avez en réalité parcouru que le scénario numéro 1. Quoi ? Comment ? Et Oui, car Radical Dreamers joue à fond la carte du RPG-Textuel, et vous propose d'incarner jusqu'au bout le trio des rêveurs alternatifs (c'est le titre du jeu après tout !). Le jeu vous propose donc de recommencer une nouvelle partie, mais en voyant ce que cela donnerait si vous aviez fais un autre choix lorsque cela était possible. Et inutile de vous dire que la moindre modification dans vos choix peut entrainer des bouleversements considérables ! Ainsi, il est même possible de s'engager dans un scénario où vous ne mettez pas du tout les pieds dans le manoir. Entre histoires délirantes, comiques, tragiques ou vraiment émouvantes, le principe est toujours le même : observer les implications et conséquences de chacun de vos choix. De fait, la richesse du scénario étonne, et constitue véritablement le point fort de ce jeu.

La grande bibliothèque, un lieu riche en trouvailles
Griffon

Parlons maintenant des points qui fâchent.Car tout n'est pas rose dans Radical Dreamers (rien n'est rose d'ailleurs, on est plutôt dans des teintes sombres!). C'est en effet du côté de la réalisation que le jeu pêche. Graphiquement parlant, le jeu ne fait pas du tout honneur à la console. Certains fonds fixes illustrent quelques rares scènes clef et les principales pièces du manoir, alors que la plupart du temps, c'est finalement juste un simple fond noir figurant l'obscurité. L'effet recherché est celui de la subjection. Les scénes sont d'autant plus poignantes qu'elles sont suggérées et non montrées. Et il est certain que l'ambiance sombre, dérangeante, de Radical Dreamers est parfaitement rendue. Les musiques n'y sont pas pour rien. La bande son est sublime, un véritable enchantement, avec des thèmes que vous connaissez certainement alors même que vous n'avez pas joué au jeu. Car Chrono Cross les reprendra quasiment tous, et les fera connaitre. Cependant, on peut reprocher à Radical Dreamers de ne possèder que peu de pistes finalement. Avec une telle qualité, c'est très regrettable. Enfin, la jouabilité particulière pourrait ne pas plaire à tout le monde. Pourtant, on est vraiment impliqué dans le jeu, et son ambiance, sa richesse, son scénario et son rôle de pivot central dans la série des Chrono en font un incontournable dans la longue liste des RPG de la Super Famicom.

L'heure du duel ! Lynx affronte Magil, Sege et Kid !
A y est c'est bon ^^

 

Graphismes : La Flamme de Glace L'objectif de la suggestion plutôt que de l'illustration est certes clairement atteint, mais à quel prix ? Le niveau graphique de Radical Dreamers est vraiment très faible, et assez inaceptable pour un jeu d'une telle envergure.

Animation : Bon, ben là, c'est reglé, il n'y en a pas, ou vraiment si peu. Les fonds graphiques sont fixes. Rien ne bouge, rien n'est animé. Le manoir parait ainsi vide, inhabité et l'atmosphère est lourde, parfois oppressante. Heureusement, les dialogues assurent à eux seuls la vie des personnages et leur confèrent un charisme impressionnant.

Musiques : Magnifique, sublime, en parfaite harmonie avec le jeu et les scènes illustrées. La bande son est devenue un best-seller et fut reprise dans Chrono Cross. Une franche réussite !

Jouabilité : Avec des commandes simplissimes, jouer ne pose aucun problème. Il suffit de choisir ses actions. Malheureusement, les combats souffrent de cette simplicité. L'expérience du RPG-Textuel est très intéressante, mais permet aussi d'en mesurer ses limites.

Difficulté : Il est tout a fait possible de mourir dans Radical Dreamers, mais jamais par fatalité. Un minimum de bon sens permet de se sortir de toutes les situations. Quelques énigmes peuvent occasionnellement bloquer la progression, et il faut veiller à ne pas se perdre dans le labyrinthe que constitue le manoir Viper.

Durée de vie : De prime abord, on est décu. Il est vrai que la fin du jeu arrive assez rapidement. Mais ce serait oublier que nous avons affaire à un Chrono ! 7 scénarios parrallèles sont proposés et 10 fins différentes assurent une longévité plus qu'honorable au soft.

La note : Finalement, on aborde Radical Dreamers par curiosité et on en ressort enchanté. En plus de proposer une expérience novatrice dans la forme, le jeu recèle de secrets et de révélations sur la saga, éclairant d'un jour nouveau les 2 autres épisodes. Le rêve de Trigger est prolongé, et celui de Cross atteint son apogée. Le scénario de folie que constitue l'ensemble des trois oeuvres et qui ne se comprend dans sa globalité qu'après de nombreuses heures de jeu est d'une complexité affolante. Ne vous arrêtez pas à la réalisation graphique très pauvre du titre, et venez vivre l'aventure de nos 3 rêveurs alternatifs ... de l'intérieur !

 

Serge dans Chrono Cross
Kid dans Chrono Cross
Lynx dans Chrono Cross

Diddu